LES KOSHAS
Selon la philosophie du Yoga, l’être humain est composé de cinq « Koshas ». Au sens littéral du mot, « koshas » peut se traduire par : fourreau, gaine, étui, enveloppe, etc. Pour des raisons de commodités, nous utilisons la traduction enveloppe. Elles représentent les enveloppes constitutives de l’être incarné (jîvâtman).
ANNA MAYA KOSHA (enveloppe de nourriture)
Est liée au corps physique, corps par lequel doit passer la connaissance. Au sens de l’enseignement du yoga, rien ne peut se faire sans la connaissance de cette enveloppe grossière provenant de la prédominance de l’élément terre (Prithivî), dont la connaissance est obtenue par la pratique des âsanas et du prânâyâma.
Mieux connaître les neuf systèmes principaux qui soutiennent le corps (les os, les muscles, les systèmes digestifs et d’assimilation de la nourriture, la circulation du sang et de la lymphe, l’appareil respiratoire, le système d’évacuation des déchets, le système nerveux composé des organes d’action et de sensibilité du corps, les glandes, les organes de reproduction), est nécessaire à l’évolution personnelle. Sans la connaissance du grossier, comment maîtriser le subtil.
L’enveloppe de Anna maya kosha relie l’être humain au plan matériel de l’existence et aussi au côté sombre, non résolu de lui-même. C’est par ce corps qu’existe le monde manifesté, nos représentations qui produisent le Karma, misères et souffrances, joies, douleurs et peines.
Swami Yogheswarananda Saraswati dans son livre « la science de l’âme » , explique : « Anna maya kosha est le château aux neuf portes, (les yeux, les oreilles, les narines, la bouche, les organes d’évacuation et de reproduction). Cette enveloppe sert de véhicule à l’âme, abritant celle-ci. L’évolution intérieure doit se faire en pénétrant dans ce château, mais ces portes ne peuvent servir à entrer à l’intérieur, car elles se referment après un bref parcours. L’entrée principale n’est pas visible de l’extérieur, elle est secrète et cachée et pourtant nous devons entrer dans le château par cette porte seulement.
C’est pourquoi, avant de percevoir le subtil, nous devons acquérir la science de la nature interne et externe de Anna maya kosha. Ce corps physique est constitué des cinq éléments matériels et il est né des actions passées (karma). Il a deux parties la plus grossière est Anna maya kosha et l’autre partie est Prânâyâma kosha. Ensemble, elles offrent des services grossiers au Seigneur du château (jîvâtman). Pour comprendre la vraie nature de cette enveloppe, nous devons développer l’impassibilité (vairâgya) à son égard. De cette façon, le corps grossier devient une aide sur le chemin de la libération ».
Les fonctions de Anna Maya Kosha
Les karmas de l’être incarné portent les fruits de trois manières : l’appartenance à une classe, un rang – une espèce et une forme soit animale, végétale ou humaine – la durée de la vie et l’âge actuel et ce que l’on fait de sa vie, les différentes jouissances, ce qui est récolté ainsi que l’expérience qui en résulte, ainsi que la conséquence des karmas relatifs aux vies antérieures.
Dans cet état, le sens de l’activité est fort (Rajas), il domine sur le sens de l’équilibre et de l’harmonie (Sattva) et amoindrit l’inertie, le manque de volonté (Tamas). De ce fait, il engage dans les plaisirs des sens. Cela comprend les jouissances tels que boire, manger, se divertir et courir dans tous les sens de façon désordonnée. Bhoga qui est à la fois douloureux et agréable est réalisé par l’enveloppe de Anna Maya Kosha par l’intermédiaire des cinq organes d’action, le nez – les yeux – les oreilles – la langue – la peau, ainsi que des cinq sens – l’odorat – la vue – l’ouïe – le goût – le toucher.
Les conséquences qui en résultent sont plaisirs et douleurs selon la nature ou le vice des actions accomplies. Ici, Purusha est limité par Prakriti et souffre de la douleur de la naissance et de la mort .
Par le prânâyâma, le voile des afflictions recouvrant la lumière intérieure est atténué par la qualité sattvique, le mental atteint la quiétude, et devient apte à se concentrer.
« Quand le corps physique est fatigué, l’état d’éveil de la conscience qui prédomine dans Rajas et Sattva devient tranquille et Tamas prédomine dans le sommeil qui se manifeste. Alors, le corps physique s’allonge, inactif, comme une machine au repos. Lorsque un certain degré de Rajas augmente au cours du sommeil, les rêves font leur apparition. Un peu de la qualité de Rajas persiste encore dans le sommeil au cours duquel la respiration, la digestion de la nourriture, la circulation sanguine et autres fonctions internes se poursuivent (Swami Yogheswarananda Saraswati).
Le plaisir et la douleur ressentis dans le rêve sont un second type de jouissance (Bhoga), dû aux fruits du karma. Dans l’état de sommeil profond, l’être ressent s’il a bien dormi ou si son mental est troublé. De cette façon, chacun expérimente aussi le plaisir et la douleur dans le sommeil profond.
PRÂNA MAYA KOSHA (enveloppe d’air vital)
Comprend le corps éthérique et le corps astral, et est lié au système émotionnel de l’être. Les enveloppes de Anna maya kosha et Prâna Maya kosha prennent leur origine en même temps. Cependant Prâna maya kosha est le support principal de la vie du corps grossier.
Texte de Swami Yogheswarananda : « Lorsqu’on peut admettre, reconnaître, accepter, observer toute chose, toute différence, le mental peut se détacher de tous côtés et se consacre à la recherche intérieure. Apparaît alors un voile très ténu qui porte le nom de Prâna Maya kosha, qui conserve en activité la couche dense qui couvre le corps physique. Cette enveloppe d’air vital pénètre tout le corps physique, le traverse de l’intérieur comme de l’extérieur ; elle maintient l’enveloppe physique toujours engagée dans différentes activités et lui infuse la vie. Sans cette enveloppe d’air vitale, le corps ne peut pas vivre, ne serait-ce qu’une seconde. Cette enveloppe a la forme de l’enveloppe physique, mais elle est beaucoup plus subtile, plus délicate et toujours en éveil. »
Durant la vie physique, le Prâna ainsi que le pouvoir de connaissance, s’élevant tous deux du fond du cœur, se transforment en une force de vie, et par le biais du corps astral gardent l’air vyana(1) en activité. Les cinq prâna(1) et les cinq sous-prâna(1) sont en relation avec Prâna Maya kosha, tout comme les membres sont reliés au corps physique.
Prâna Maya kosha n’est pas visible par la vue normale, elle est expérimentée à travers le sens du toucher (par la peau). Elle prend la forme de tout objet grossier avec lequel elle entre en contact. Elle est vue par l’œil Divin au cours de la méditation. Sa couleur ressemble à des nuages blancs à reflets bleutés, ou quelquefois comme un ballon rempli de vapeurs lumineuses.
Lorsque que Sattva la pénètre, elle est d’une transparence lumineuse. Si Rajas prédomine, elle prend une lueur dorée et lorsque Tamas prédomine, elle est de couleur fumée.
Le développement de Prâna Maya kosha se fait grâce aux pratiques du prânâyâma. Mais sa maîtrise s’effectue par la pratique de la rétraction des sens (Pratyahara), à travers les pratiques du Prânâyâma.
Alors qu’elle est la cause des souffrances dues à la faim et à la soif, de l’agitation due aux désirs, etc. elle procure la satiété lorsqu’elle supprime ces derniers. Elle est aussi la cause des plaisirs sexuels, etc. Après la mort, cette enveloppe se résorbe dans sa cause, l’élément air. »
MANO MAYA KOSHA (enveloppe du mental)
C’est le siège du mental, qui comprend quatre parties appelé « Antahkarana ». La révélation des sciences subtiles ne peut se faire que grâce à cet Antahkarana. Il est donc nécessaire d’acquérir la connaissance des éléments constituant la forme, la taille, la couleur et les fonctions de cet organe interne comprenant :
Manas, la faculté mentale du concept et de l’imagination – Buddhi, la faculté de l’intellect ou de la raison ou de raisonner, le leader du mental – Ahamkâra, le sens de l’individualité ou de l’égoïsme – Chitta, la matière mentale de la mémoire et de l’émotion.
Bien que Buddhi et Ahamkâra agissent en relation avec Vijnâna Maya kosha, Chitta et Buddhi sont deux des principes dans lesquels prédomine la connaissance.
Manas prend naissance dans les parties sattvique et rajasique de Ahamkâra, c’est pourquoi il engage les sens, et les organes de l’action, et non pas buddhi.
Le mental permet aux sens d’apprécier les objets grossiers et également les subtiles joies divines. Lorsque le mental se joint aux organes d’action et aux organes de perception et les engage dans leurs fonctions respectives, l’agrégat du mental et les dix Indriyas est appelé Mano maya kosha.
Il a sa demeure dans le sahasrâra, la couronne de la tête. Le mental concret permet d’accéder au stade de pratyahara (retrait des sens), et le mental abstrait à l’étape de dharâna (concentration).
Mano maya kosha permet de satisfaire les désirs, de régler les questions d’argent et de subsistance matérielle, et permet de résoudre les problèmes immédiats de notre environnement.
VIJNÂNA MAYA KOSHA (conscience des dimensions physiques et causales)
Mano maya kosha et Vijnâna Maya kosha constituent l’essence du corps astral (sûkshma sharîra). C’est le siège de l’intellect. Il comprend la faculté d’apprendre, de comprendre (Buddhi) et le principe qui crée l’exclusivité, l’égoïsme qui développe le sens du »je » et du »moi » – sens de l’ego – (Ahamkâra).
Vijnâna maya kosha est le siège de la connaissance, domaine du supra mental et le plan de l’âme spirituelle. Un peu comme Manas, l’intellect est aussi une masse ovale de lumière transparente, claire et non émanée, brillante comme l’orbe du soleil, libre de la sensation de chaleur et du toucher. Sa taille varie aussi sous l’influence des trois gunas.
Il a deux formes : un état particulier qui est très clair, resplendissant, lisse, capable de discernement, c’est l’intellect porteur de Vérité (Ritambharâ) ; et l’état de l’intellect ordinaire dans lequel l’impureté de tamas se mélange à l’inconstance de rajas, affectant les décisions qui sont, par conséquent, influencées par l’illusion.
Lorsque l’intellect contrôle les sens du mental, il porte le nom de Vijnâna Maya kosha, ce qui représente l’essence de la description du corps astral. Cet agrégat accomplit les fonctions de connaissance et expérience. C’est grâce au mental que la révélation des sciences subtiles est possible. Nous devrions retenir que Antahkarana est le possesseur des membres (Angî), tandis que Manas, Buddhi, Ahamkâra et Chitta en sont les membres ou Angas.
« Vijnâna maya kosha permet une connaissance infaillible et la science des objets supra sensoriels, à condition que tamas et rajas soient réalisés. La réalisation de Vijnâna maya kosha s’appelle Parama Pratyaksha (tout est absolument clair), ce qui est possible que lorsque l’intellect atteint à un calme parfait en toutes circonstances heureuses ou malheureuses. »
ANANDA MAYA KOSHA (enveloppe de félicité) – Représente le corps causal (Kârana sharîra).
« Lorsque dans la méditation on entre dans le corps par le centre entre les sourcils, on voit les nerfs et les vaisseaux sanguins du corps physique. On réalise les éléments du corps physique, tels que la gorge, le cœur, le nombril, etc. Ayant pleinement réalisé le corps physique on entre dans Prâna Maya kosha, on perd alors la conscience du corps physique et on sent alors le corps illuminé et très léger. Alors on expérimente les prâna et les sous prâna. Puis on pénètre dans Mano Maya kosha et Vijnâna Maya kosha et enfin en Ânanda Maya kosha et on voit à l’intérieur du cœur la masse de lumière.
A l’intérieur du cœur est un espace de forme ovale comme un petit raisin blanc sans pépin connu comme « Jyotir linga » (la masse de lumière). Cette masse de lumière est un agrégat de six orbes lumineux (Swami Yogheswarananda Saraswati).
Ânanda Maya kosha concerne la connaissance des trois germes en état latent (tribindu) : Soleil (Sûrya bindu), Lune (Chandra bindu) et Feu (Vahni bindu). Ces germes (bindus) sont les énergies latentes (Shakties) correspondant aux trois états de l’être : Ichchhâ la volonté, Kriyas l’action et Jnâna la connaissance.
Dans cette conscience, l’Atman devient l’être bienheureux, l’âme de félicité productrice de toutes choses. Un état de félicité, d’harmonie, de joie, de richesse intérieure totalement indescriptible.
(1) LES CINQ FORCES PRANIQUES
Prâna : qui est continuellement en activité, il représente l’énergie nerveuse, le souffle vital, il relie le mental à la matière.
Il actionne la glande thymus, assure la respiration, la déglutition, aide à la prononciation des sons, permet de faire descendre dans l’estomac tout ce qui est mangé et bu, d’occasionner la sueur, de maintenir la chaleur du corps, il donne la couleur rouge au sang et permet de le faire circuler. Il provoque la sensation de faim et de soif.
Prâna pénètre dans le corps humain à travers le centre lunaire (vishuddha), descend en longeant l’axe vertébral. Son énergie est ingérée par le corps en même temps que l’oxygène.
Prâna va de la bouche, dans le nez, jusqu’au cœur par l’inspiration et l’expiration, son mouvement est ascendant.
Apâna : représente le système énergétique qui permet à un corps en bonne santé de procéder à des évacuations. Il représente le souffle expiré. Il a tendance à aller au cœur puis à sortir vers l’extérieur. Il anime les reins, filtre l’urine, relâche les sphincters pendant la miction et permet de vider la vessie. Il évacue les menstrues, le sperme, c’est grâce à apâna que le travail peut se faire chez la femme pendant l’accouchement.
Il fait circuler les sucs digestifs dans les intestins, stimule les membres inférieurs depuis les hanches, les cuisses, les genoux jusqu’aux orteils. Apâna permet l’évacuation de l’eau sous forme de transpiration et rejette les résidus gazeux par les voies respiratoires.
Il va du nombril à la plante des pieds, il est caractérisé par la lourdeur et se meut vers le bas.
Le bon fonctionnement de apâna est revitalisé par la pratique de mûla-bandha.
Samana : concerne le système digestif. Pendant la digestion, il occasionne la sécrétion des sucs digestifs dans l’estomac et rend la nourriture apte à être assimilée par le corps. Il participe au fonctionnement du foie, du duodénum, de l’intestin grêle, du pancréas, de la rate, des reins, du processus urinaire. Il assure les fonctions de l’assimilation, conduit le sang au foie. En raison de sa nature, il est réchauffant quand il se joint à la bile et refroidissant quand il se joint au flegme. Sa localisation va du cœur au nombril.
La fonction de samana est activée par la pratique de uddiyana-bandha.
Udâna : permet la capacité d’évoluer ou de régresser en fonction des capacités mentales, de l’aptitude à gérer les fonctions émotionnelles. Il règle le débit de l’air, la tension des cordes vocales quand nous parlons et actionne la glande thyroïde. Ce qui concerne le corps en position debout, qui empêche le corps de tomber et le redresse, tout ce qui est mangé et bu et poussé en bas ou vomi porte le nom de Udâna Vâyu.
Par le contrôle de Udâna Vâyu, le corps peut devenir plus léger que l’air et s’élever vers les mondes plus élevés. Il est (Tiryak-gâmi), c’est-à-dire se mouvant de la même manière que l’air.
Sa localisation va de la gorge jusqu’à la tête. Il est régulé par la pratique de jalandhara-bandha.
Vyana : est ce qui traverse tout le corps. Il procure l’énergie nécessaire aux besoins physiques et physiologiques en la répartissant dans chaque partie du corps en fonction des besoins du moment.
Il aide les nerfs sensoriels grossiers et subtils à être actifs, il favorise les battements du cœur, l’ardeur du corps, la circulation du sang et toutes les autres fonctions des prâna et sous-prâna. Il actionne également les organes génitaux et les glandes surrénales.
Les cinq sous-prâna :
Naga est situé dans la bouche ; Il produit le rot, le hoquet. Kurma est dans les yeux ; Il commande le clignement de l’œil, l’ouverture et la fermeture des yeux par les paupières. Krikara est localisé dans la gorge ; Il induit la faim et la soif. Devadatta est localisé dans les narines ; Il est la cause du bâillement, de l’éternuement. Dhananjaya parcours le corps entier ; Il aide aux mouvements d’allées et venues du corps. Après la mort, il est la cause du gonflement du corps et de sa décomposition.